Claudia Cardinale et Jacques Perrin : les Mardis du cinéma permettent de (re)voir une pépite de 1961 de Valerio Zurlini le 5 décembre aux Variétés.
Fellini, Visconti, Rosselini… : autant de réalisateurs bien connus des amateurs de cinéma italien. Il en est un dont le patronyme en « i » reste plus secret : c’est Valerio Zurlini. Pourtant, parmi ses onze films qu’il réalisa entre 1954 et 1976, certains sont des joyaux du cinéma italien. Des films souvent graves et fiévreux, comme Été violent (avec Jean-Louis Trintignant), Le Professeur (avec Alain Delon) ou La Fille à la valise. La présence récurrente d’acteurs français au générique de ces films ne doit pas surprendre: elle est due aux innombrables coproductions franco-italiennes de cette heureuse époque où le cinéma transalpin offrit tant de chefs d’œuvre.
Tourné en 1960, La Fille à la valise met en scène la rencontre inopinée entre Lorenzo, garçon timide de 16 ans issu de la grande bourgeoisie, et Aïda, fille du peuple, la vingtaine ravageuse. Magnifiée par un noir et blanc somptueux, Claudia Cardinale révèle une beauté pulpeuse et nature. Une sensualité solaire. Si sa prestation d’épouse bafouée de Marcello Mastroianni dans Le Bel Antonio (1959) avait su déjà convaincre, La Fille à la valise lui offre un an plus tard une riche partition, avec la possibilité de jouer les émotions les plus variées en passant en un clin d’œil de la gaieté au désespoir. Face à cette « belle plante » sauvage qui cherche sa place et se démène pour subsister, le frêle Jacques Perrin offre son visage de Petit Prince au grand cœur, chaviré par la révélation de l’amour pour cette fille qui n’est pas de son monde, et qui ne le sera jamais.
Zurlini excelle à filmer la naissance vraie du sentiment et les égarements du cœur et de l’esprit, en scrutant les regards, en suivant les mouvements du corps qui en disent plus long que des discours. Sa caméra, amoureuse de ses acteurs, sublime les visages, les nuques, la courbe des épaules. Elle sait aussi filmer la fragilité des êtres perdus dans des décors trop grands – une demeure patricienne, une plage de Rimini… Mais le réalisateur n’est pas seulement un esthète. Il sait aussi montrer les barrières sociales infranchissables et la triste condition d’une jeune femme pauvre, trompée par les hommes, ballotée par les événements.
La Fille à la valise est un film qui a la grâce. Ne le manquez pas sur grand écran !
(novembre 2017 - D.R.)